Extraits du livre

Au "Vieux Chalet", du temps de "l'hôtel avant l'hôtel"

 

Roger : « Le week-end, mon père partait faire l’Étendard avec les clients. C’était « la » grande balade, ils allaient coucher au refuge et revenaient le lendemain matin. Le chalet était donc vide... mais grand ouvert, car on ne fermait jamais les maisons à clé en montagne.

Pour que les clients puissent faire leur toilette, Sylvain mettait à chauffer une grande bassine d’eau. Quand elle était bien bouillante, les clients descendaient avec un broc, le remplissaient et remontaient le vider dans la cuvette qu’ils avaient dans leur chambre. Ils pouvaient ainsi se laver. »

 

Raymonde : « Les gens qui venaient aimaient le genre de vie, simple et familial qui leur était proposée au chalet. Ils étaient nourris de café au lait, de pain, de beurre et de confiture au petit déjeuner et ensuite, le papa faisait de grands plats de gratins, de la soupe. C’était une sorte de colonie, il n’était pas question de faire les chambres, les clients les faisaient eux-mêmes. Sylvain s’est tout de suite passionné pour ce métier d’hôtelier. »

La construction, début des années 50

 

Henri : « Le papa a décidé de faire des parpaings, mais attention, pas creux comme ceux qu’on achète maintenant. Lui, il a tout fait en parpaings pleins. De véritables blocs de béton qu’on a fabriqués !

Le sous-sol était déjà fini, ce qui nous permettait de travailler à l’abri. Nous avions rentré le sable, le gravier, le ciment, qu’il fallait couvrir pour éviter que ça gèle. Le papa a fait deux moules à parpaings en bois. Ces « bastaings » étaient composés de deux planches de 20 cm de haut, de 5 cm d’épaisseur. Tous les 20 cm, il avait fait des rainures sur toute la hauteur de la planche, dans lesquelles il glissait une planche. Le moule était prêt pour faire une quinzaine de parpaings et tout tenait aux serre-joints.

Il fallait brasser le béton à la main, brasser le gravier, le sable, avec la pelle, ajouter de l’eau. C’était dur. Puis on ramenait le béton à la pelle dans les moules et on tassait avec la masse. Je n’aimais pas ce travail. Au bout de deux jours, le béton avait séché, on enlevait les serre-joints, les grandes planches tombaient et nous démoulions. Chaque moellon pesait 30 à 40 kilos. Tout l’extérieur au-dessus des pierres du 1er étage, tout le 2e et le 3e étage, ont été faits en moellons. L’intérieur, entre les chambres, c’était un peu pareil. Une véritable forteresse !

L'hôtel au temps de Sylvain et Marie (1959-1972)

 

Henri : « Avec le papa, nous étions allés chercher le fourneau avec le mulet et un traineau, une sorte de grosse luge. Mais impossible de le bouger. Nous avions dû aller chercher du renfort à la caserne des militaires. Ils donnaient volontiers de bons coups de main. Une fois encore, ils ont été d’une grande aide. Quand même, heureusement qu’il y avait de la neige et que vous avons pu passer devant Beausoleil, sinon, même à si nombreux, ça aurait été trop lourd ! »

 

Roger : « Et le fourneau a pu être transporté jusque devant chez nous. Restait à le rentrer dans l’hôtel et ce n’était pas une mince affaire parce qu’il était… trop grand ! Il a fallu démonter un carreau de la porte. Et tout cela, bien sûr, avec des clients dans l'hôtel !

Le fourneau était à charbon. Nous avions donc besoin d’un gros stock de ce combustible, d’autant que la chaudière, aussi, était à charbon : le papa commandait 12 tonnes pour le chauffage, 8 tonnes pour le fourneau. Le camion montait livrer tout cela au début de l’hiver. Mais la route ne venant toujours pas jusqu’à chez nous, il déchargeait au rond-point. Nous devions donc nous coltiner le transport de 20 tonnes de charbon sur des luges, du Plateau jusqu’à l’hôtel ! »

L'hôtel au temps de Roger et Michèle (1972-2006)

 

Roger : « En pleines vacances de février, après le service du midi, le chef a fait ses valises et il est parti, emmenant du même coup la femme de chambre. Il faisait beau ce jour-là. Les clients, qui prenaient le soleil sur la terrasse, ravis de voir s’en aller un si piètre cuistot, avaient applaudi. »

Michèle : « Nous étions en février, l’hôtel était complet ! 70 personnes, plus de chef et Roger qui ne savait pas faire cuire un œuf ! J’ai filé au Corbier acheter un livre de cuisine et on s’est dit qu’il n’y avait plus qu’une chose à faire : se mettre à faire à manger à ces 70 personnes ! »

 

Roger : « Il m’a fallu assurer et me mettre à la cuisine. Je préparais des raviolis pour le soir... en boîte, bien sûr ! J’en ai bavé et ai vraiment regretté de n’avoir pas regardé, les années précédentes, comment faisaient les cuisiniers. (...)

 

Roger : « Nous avons fini la saison comme ça et l’année d’après, nous avons décidé que nous ne reprendrions pas de cuisinier et que j’allais continuer. J’avais 29 ans. »

L'hôtel au temps de Stéphane et Agnès (depuis 2006)

 

 Stéphane : « Notre organisation est toujours la même. Quand on a une formule qui marche, pourquoi changer ? (...)

Le cœur du métier, qui est l’accueil des clients, ne change pas. Au contraire. Les gens sont de plus en plus demandeurs de mettre de l’humain au centre de leurs vacances. Que ce soit à l’hôtel ou en chambres d’hôtes, ils ont envie de discuter avec quelqu’un du pays. »

Agnès : « J’ai été très frappée par le côté familial des clients : ils osent nous poser des questions et quand ils reviennent, ils prennent de nos nouvelles. Ils en donnent aussi, et du coup, ils nous suivent, eux, mais les suivons, nous aussi, et ce, pendant des années. Ils aiment bien raconter quand ils sont là et pensent même toujours à nous envoyer des faire-part de mariage, de naissances. On sait quand leurs enfants se marient. »

 

Stéphane : « De nombreux clients reviennent régulièrement. Certains, depuis quarante ans... ou même plus ! » 

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